Zibeline | Sortie d’album Kevin Norwood 4tet
Kevin Norwood réunit autour de lui trois musiciens à l’impeccable maestria –Sam Favreau (contrebasse), Cedrick Bec (batterie, pad spd et électroniques) et Rémi Ploton (piano, claviers, arrangements électroniques)- pour son nouvel opus, Hope, mûri dans le nid accueillant et fertile du Petit Duc. Depuis 2019, l’équipe de cette salle propice à la création suit l’élaboration du projet : Myriam Daups et Gérard Dahan, les âmes du lieu, encouragent, conseillent, confortent, suggèrent, offrent un écrin où l’alchimie opère. Pour la première fois, le Petit Duc produit (avec ONDE-Music Lab & Label-distrib. InOuïe distribution) un disque, nouvelle étape dans l’accompagnement des artistes et peut enfin sourire en affirmant que « les œufs de Petit Duc sont aussi des albums ! ». Le 5 novembre, le CD Hope, fraîchement sorti, était présenté lors d’un premier concert, précédé et suivi (là encore il s’agit d’une innovation) d’un showcase, d’abord à 12h en direction du continent asiatique, puis à minuit vers l’américain. Entre les deux, le concert était joué en présence du public en salle et celui présent grâce à la chaîne du Petit Duc (et dont les réactions ainsi que les questions sont transmises à la fin par les courriels lus par Myriam Daups). Il faut d’ailleurs souligner la superbe prise de son qui met les auditeurs dans une situation acoustique proche de celle du live, et que l’on retrouve dans celle, irréprochable de l’enregistrement du CD.
Un seul des huit titres n’est pas dû à Kevin Norwood, mais reprend une composition de la chanteuse canadienne Joni Mitchell qui fait partie de la constellation des musiciens qui ont influencé le jeune artiste, Both Sides, Now (in l’album Clouds, 1969), inspirée de l’essai Henderson, The Rain King de l’écrivain Saul Bellow (1959). La poésie rêveuse des textes, tous en anglais, conjugue ses sonorités et ses rythmes aux mélodies qui savent se fondre en de subtiles improvisations, contrebasse onirique, batterie aux respirations moirées, piano inspiré. La voix étonnante du chanteur se joue des hauteurs, passe de la voix de tête à celle de poitrine, s’élève aérienne, s’incarne puissamment dans un souffle, se nourrit des assonances et des allitérations, s’emporte en scats qui habitent le corps entier de l’interprète dont les doigts effleurent un saxophone (son instrument de prédilection) invisible sur lequel s’ancre le mouvement des rythmes qui naviguent entre l’Europe et l’Afrique, comme dans le superbe Beloved Nature, hymne à une beauté de la nature réconciliée avec l’humain… On se laisse porter par un rêve de paix (Released), une promenade où les voix des anges nous accompagnent (Ballade à Deux), une prière protectrice de la fragilité d’un enfant (Rosalie), la lente éclosion des fleurs, qui est aussi celui de la vie (Shadows and light)… Le jazz se nourrit de toutes les influences, laisse parler les silences, unit la complexité inventive des orchestrations qui font entrer des sons du quotidien au cœur de la trame mélodique, le tout nimbé d’une immense tendresse. Une pépite !
MARYVONNE COLOMBANI
Novembre 2021
Concert donné le 5 novembre au Petit Duc, Aix- en-Provence
Hope, Kevin Norwood Quartet, éditeur Onde Music, 15€